Deux-en-un : le NanoChemiscope 3D

Un extraordinaire instrument d’analyse des surfaces

22 août 2013 | MARTINA PETER
Le NanoChemiscope 3D est une merveille issue des plus récentes technologies d’analyse. En tant que développement à partir de technologies connues de la microscopie et de la spectroscopie de masse, il permet d’investiguer simultanément les propriétés physiques et chimiques de surfaces jusqu’au niveau atomique. Cet instrument unique au monde ne fournit pas seulement des images de surfaces de très haute résolution ; il détermine également de quoi elles sont constituées.
https://www.empa.ch/documents/56164/260886/a592-2013-08-22-b0x+stopper+3D-NanoChemiscope.jpg/5d027549-0a40-48ba-862f-03c12f39e66d?t=1448296375000
 

Résultat de l’analyse de surface ToF-SIMS/SFM combinée tridimensionnelle, d'une couche mince de polymères PCBM/CyI,utilisée dans la division d'Empa « polymères fonctionnels » pour le développement de cellules solaires organiques.

 
Quel est le point commun entre un manchot et la surface d’une cellule solaire ? Pas grand-chose, reconnaît Laetitia Bernard, physicienne à l’Empa. Elle a toutefois dû sourire lorsque, travaillant sur une couche mince de polymères conçue pour le développement de cellules solaires organiques, elle a vu apparaître les contours d’un manchot. Un petit détail dans le monde complexe de la microscopie de haut vol. Le NanoChemiscope 3D développé à Empa permet pour la première fois d’investiguer localement à la fois les propriétés physiques et chimiques, et ainsi de déterminer la nature exacte et la localisation en 3D des composés chimiques d’un échantillon. De plus, il est aussi possible de déterminer simultanément diverses propriétés mécaniques telles que la dureté, l’élasticité ou le coefficient de friction, et de les corréler avec l’information chimique. Dans l’exemple du «manchot», cela signifie que le NanoChemiscope 3D permet d’imager non seulement les contours du «manchot», mais d’identifier également les polymères qui forment son « bec », son « œil » et ses « alentours». Grâce à cette nouvelle technique d’analyse, les chercheurs dans le domaine des cellules solaires peuvent contrôler efficacement les mécanismes régissant la formation des couches minces polymériques et adapter leur procédure de fabrication selon le résultat désiré.
 

 
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Quelques-unes des nombreuses images provenant de l’analyse du NanoChemiscope 3D.
Avec le SFM, la surface est reproduite topographiquement (l'image de gauche montre une zonede 12µm x 12µm. Les différences de hauteurs visibles dans l'image sont de 100 à 200nm).
Avec le TOF-SIMS, il est possible localiser les deux différents polymères constituant la couche mince (les images du centre et de droite montrent la distribution des ions C-+ C2- et CN-+I- respectivement).

 

 
Microscope à force atomique et spectromètre de masse de haut vol
La technique d’analyse offerte par le NanoChemiscope 3D n’est autre que la réunion de deux technologies établies, mais jusqu’à présent indépendantes. Le microscope à force atomique (SFM, de l’anglais « scanning force microscope ») scanne la surface avec une pointe ultrafine, tandis que le spectromètre de masse à ions secondaires (ToF-SIMS, de l’anglais « time-of-flight secondary ion mass spectrometry ») détermine la composition chimique de la première couche moléculaire de la surface de l’échantillon au moyen d’un « bombardement » d’ions sur la surface.
 
Jusqu’ici, lorsque l’on souhaitait examiner des surfaces pour déterminer leurs propriétés tant chimiques que physiques, l’échantillon devait être analysé dans deux appareils différents. En raison du transport d’un instrument à l’autre, on encourait le risque de contaminer ou d’oxyder l’échantillon. En outre, sachant que les zones d’investigations sont généralement de l’ordre de quelques micromètres, il était quasiment impossible de retrouver exactement l’endroit examiné d’un instrument à l’autre. Qu’y avait-il alors de plus logique que de « réunir » les deux appareils dans une unique chambre à haut vide? Jusqu’à présent, les physiciens et les ingénieurs se heurtaient aux limites inhérentes à chacune de ces deux technologies. Dans le cadre d’un projet de 4 ans soutenu par l’Union Européenne, Laetitia Bernard, directrice du projet, a développé un nouvel appareil dans lequel un SFM et un ToF-SIMS sont disposés aussi près que possible l’un de l’autre et reliés par un système de déplacement sophistiqué dans une chambre à ultra haut vide. Suite à un travail minutieux mené en collaboration avec des chercheurs de l’Empa et des partenaires universitaires et industriels de plusieurs pays Européens, le NanoChemiscope 3D a pu voir le jour.
 

 
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Sasa Vranjkovic, ingénieur spécialisé en SFM, et Laetitia Bernard, directrice du projet NanoChemiscope 3D, discutent du design du système de déplacement.

 

 
Outre les développements liés au SFM et au ToF-SIMS eux-mêmes en vue de performances accrues, les experts de l’Empa ont particulièrement mis l’accent sur le développement du système de déplacement piezo-motorisé de l’échantillon. En effet, celui-ci est vital pour « passer » du ToF-SIMS au SFM et vice versa, avec rapidité et pour une précision de l’ordre de la centaine de nanomètres. Ceci est effectué au moyen de platines combinées sur 5 axes, qui « glissent » sous l’action de piézomoteurs sur des rails comportant un revêtement de carbone semblable au diamant (DLC). Ainsi, l’endroit à examiner peut être analysé dans les positions les plus diverses.
 
Après sa finalisation, le prototype – un géant d’aluminium d’un mètre de longueur, de 70 centimètres de largeur et d’une hauteur de 1 mètre 70 – est actuellement en fonctionnement chez le partenaire du projet ION-TOF GmbH à Münster en Allemagne, et est utilisé par des clients industriels et des partenaires de recherche. La construction d’instruments commerciaux est prévue, vu l’intérêt suscité dans la communauté scientifique, où l’on est disposé à payer pour cela un montant à 7 chiffres.
 
 


 

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