Une étude de l’Empa examine de plus près les écobilans de différents carburants biologiques

«Biocarburant» ne signifie pas forcémentécologique

21 mai 2007 | REMIGIUS NIDERÖST

Les biocarburants ne sont pas forcément plus écologiques que des carburants fossiles. C’est ce que montre une nouvelle étude sur les écobilans de différents biocarburants que l’Empa a réalisée sur mandat des offices fédéraux de l’énergie, de l’environnement et de l’agriculture. Certains biocarburants libèrent certes plus d’un tiers en moins de gaz à effet de serre que l’essence ou le diesel mais la culture et la transformation des matières premières telles que le maïs ou le soja provoquent toutefois d’autres charges – pour certaines graves – pour l’environnement et qui grèvent nettement leurs écobilans globaux. Il y a donc biocarburants et biocarburants et c’est cette différence qu’il s’agit de prendre en compte dans les mesure de promotion des biocarburants actuellement en discussion. Cette étude montre encore que la quantité de bioénergie indigène disponible est aussi limitée.

https://www.empa.ch/documents/56164/296595/a592-2007-05-22-b1s_biotreibstoffe.jpg/8501cda6-e0f8-40ec-b697-254609dbb1fc?t=1448299617000
 

Legende: Les biocarburants sont actuellement la forme la plus importante d’énergie renouvelable dans le trafic routier (Photo: iStockfoto)


«L’efficacité énergétique et la réduction des émissions de gaz à effet de serre qui en découle ne peuvent pas être les seuls critères d’une évaluation écologique globale des biocarburants» déclare le scientifique de l’Empa Rainer Zah qui a procédé avec son équipe à une évaluation écologique de différents carburants de remplacement que sont le bioéthanol, le biométhanol, le biodiesel et le biométhane, cela depuis la culture des matières premières en passant par la production proprement dite et jusqu’à leur utilisation. Toute une série de biocarburants permettent certes de réduire de plus de 30 pour-cent les émissions de gaz à effet de serre mais d’un autre côté la culture et la transformation de leurs matières première provoquent d’autres nuisances, pour certaines graves, pour l’environnement.

 

Ces nuisances vont de la surfertilisation et de l’acidification du sol des surfaces cultivées jusqu’à la réduction de la diversité des espèces, par exemple lors du défrichage des forêts tropicales. La production d’énergie agricole entre de plus en concurrence avec d’autres formes d’utilisation des sols telles que la production de denrées alimentaires ou la conservation de surfaces naturelles.

 

Le transport n’exerce qu’une faible influence sur les nuisances pour l’environnement

Les conclusions de cette étude de l’Empa présentée le 22 mai par les offices fédéraux de l’énergie, de l’environnement et de l’agriculture: il y a biocarburants et biocarburants et bien que chacun des quatre biocarburants examinés puisse être produit de manière écologique, les matières premières et le mode de production sont décisifs pour déterminer quels sont les carburants de substitution dont le bilan écologique global est meilleur que celui de l’essence ou du diesel. Le transport, y compris celui de biocarburants depuis l’étranger en Suisse, n’exerce par contre qu’une faible influence sur l’écobilan. La promotion par l’Etat des biocarburants, par exemple par des avantages fiscaux par rapport à l’essence ou le diesel, doit donc s’effectuer de manière différenciée. «Le préfixe «bio» ne signifie par toujours forcément écologique» déclare Zah.

C’est à des conclusions semblables qu’arrive le récent rapport des Nations Unies (ONU) sur la bioénergie durable («Sustainable Bioenergy: A Framework for Decision Makers»)1. Le groupe ONU-Energie – une réunion de tous les programmes et offices de l’ONU qui s’occupent du thème de l’énergie – souligne dans son étude qu’il est absolument nécessaire d’analyser au préalable les effets sur l’économie, l’environnement et la société avant de prendre des décisions politiques sur le développement et la promotion de certaines technologies dans le domaine de la bioénergie.

Pollution de l’environnement provoquée par la culture des matières premières de la bioénergie

Pour les biocarburants, c’est avant tout la pollution provoquée par la production agricole des matières premières qui pèse sur le passif des écobilans. Dans les pays tropicaux, le défrichage par le feu conduit par exemple à l’émission de grandes quantités de CO2 et à une augmentation de la pollution atmosphérique par la suie, des aérosols, des gaz nocifs tels que les oxydes d’azote ou les dioxines et à une diminution de la biodiversité. Dans les zones de climat tempéré, ce sont la fertilisation parfois intensive et le travail mécanique du sol qui exercent une influence négative sur l’environnement. La pollution extrêmement élevée provoquée par la production d’éthanol à partir de seigle en Europe - qui présente de loin de plus mauvais écobilan de tous les biocarburants examinés – s’explique par contre par le faible rendement de récolte.

 
Représentation de la pollution globale (axe vertical) ainsi qu’émissions de gaz à effet de serre (axe horizontal) des biocarburants étudiés, en pour-cent par rapport à l’essence. Les carburants qui se situent dans la surface marquée en vert présentent un meilleur score que l’essence aussi bien pour la pollution globale que pour les gaz à effet de serre. (UBP 06: méthode développé en Suisse qui estime la pollution totale à partir de la différence des valeurs d’émission par rapport aux valeurs limites légales. (Source: Empa)
 

Bons résultats pour les déchets, les résidus et le bois

Pour ce qui est de l’écobilan, c’est l’utilisation à des fins énergétiques des déchets, des résidus et du bois qui présente les meilleurs résultats par rapport aux carburants fossiles. Ceci d’une part du fait de la disparition de la pollution importante provoquée par la production des matières premières et d’autre part de la diminution des émissions dues à l’élimination des déchets. L’utilisation énergétique du bois – par exemple par sa gazéification – présente elle aussi de bons résultats car ici les effets de la production de la matière première sur l’environnement sont très faibles.

Par ailleurs, au contraire de ce qui est le cas pour les carburants fossiles, il existe des possibilités de réduire notablement par des mesures appropriées la pollution provoquée par tous les biocarburants. C’est ainsi que des directives de certification sévères permettraient par exemple de mieux maîtriser le problème du défrichage par le feu des forêts tropicales. Les scientifiques de l’Empa s’attendent ainsi à ce que l’amélioration des procédés existant et le développement de nouveau procédés de production viendront dans l’avenir améliorer les écobilans des certains biocarburants. Cette étude repose sur les données tirées de «Ecoinvent»»2, une banque de données scientifique unique au monde pour les données de base des écobilans créée et développée par un réseau d’institutions de recherche suisses et gérée par des chercheurs de l’Empa.

 

Limites des ressources indigènes de bioénergie

L’étude de l’Empa montre en outre que les ressources indigènes de bioénergie sont limitées. Toutefois avec une transformation efficace et écologie de la biomasse en énergie et une augmentation de l’efficacité énergétique, les supports énergétiques de remplacement pourraient, avec d’autres s formes d’énergie renouvelables, jouer un rôle important dans notre approvisionnement futur en énergie.

 

Autres informations

  • Le communiqué de presse des offices fédéraux ainsi que le rapport final complet en allemand (Ökobilanz von Energieprodukten: Ökologische Bewertung von Biotreibstoffen) se trouve sous www.bfe.admin.ch
  • «Ecoinvent» est une banque de données scientifique unique au monde pour les données de base des écobilans créée et développée par un réseau d’institutions de recherche suisses et gérée par des chercheurs de l’Empa (www.ecoinvent.ch).
  • Le congrès mondial R’07 «Recovery of Materials and Energy for Ressource Efficiency» qui aura lieu du 3 au 5 septembre 2007 à Davos comprend dans son programme le 4 septembre un atelier de travail consacré aux biocarburants (www.r07.org).


Informations sur l’étude:

Dr Rainer Zah, Technologie & Société, tél. +41 71 274 78 49,

Rédaction:

Dr Michael Hagmann, Communication, tél. +41 44 823 45 92,

 
 
 

Den Schlussbericht der Studie finden Sie auf den Internet-Seiten des Bundesamtes für Umwelt BAFU (en allemand seulement)