Efficacité accrue pour la technologie des semi-conducteurs

Plus d’énergie avec des tranches encore plus minces

10 oct. 2007 | SABINE BORNGRÄBER
Si la photovoltaïque veut s’imposer face à la production conventionnelle d’énergie, les piles solaires devront utiliser moins de silicium et présenter un meilleur rendement. Les chercheurs de l’Empa testent actuellement dans un projet CTI avec un partenaire industriel un procédé permettant de réduire de trois fois la consommation de silicium. Leur astuce: scier des disques de silicium d’une épaisseur de 100 micromètres seulement au lieu de 300 comme jusqu’ici.
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Une wafer usuel présente une épaisseur de 300 micromètres. Une technique optimisée devrait permettre de découper des disques de silicium de 100 micromètres d’épaisseur seulement.


La couverture de nos besoins d’énergie à partir de sources renouvelables est considérée comme le moyen d’éviter une crise énergétique et climatique. L’énergie solaire semble parfaitement adaptée pour cela. En une heure et six minutes exactement, le soleil fournit en effet une énergie équivalant à la consommation mondiale d’énergie de l’année 2006. Les cellules photovoltaïques, formées de semi-conducteurs, captent une fraction de cette énergie et la transforment en électricité. «Lorsqu’on parle de semi-conducteurs, on pense immédiatement aux puces électroniques pour les laser ou les ordinateurs et autres raffinements électroniques ou optiques» déclare Johann Michler qui dirige le laboratoire «Mechanics of Materials and Nanostructures» de l’Empa à Thoune. «Alors que ce sont les ingénieurs en science des matériaux et les constructeurs de machines qui réalisent des prodiges techniques lors de leur fabrication». Par exemple découper en tranches d’une épaisseur d’un quart de millimètre un cristal de silicium de la taille d’un rocher. Ou découper dans ces tranches ultrafines des plaquettes pour produire des micropuces.

 

Tirer davantage de surface d’un seul bloc


Malgré de nombreuses tentatives pour remplacer la technologie du silicium, l’industrie travaille presque uniquement avec cet or gris, sous forme de silicium amorphe ou de silicium cristallin. Avec les monocristaux très couteux, le défi consiste à découper un nombre de tranches aussi élevé que possible avec un minimum de déchets. Les scies utilisées pour cela sont formées d’un fil très fin enroulé autour du bloc de silicium et qui découpe simultanément de nombreux disques. L’idée des chercheurs de l’Empa semble triviale. Comment obtenir davantage de surface à partir d’un même bloc? Tout simplement en coupant des disques plus minces! «Pour optimiser ce processus, il faut comprendre ce qui se passe lors du sciage» explique Kilian Wasmer qui dirige le projet cellules photovoltaïques. Les rebuts lors du sciage sont rapidement coûteux car le kilogramme de silicium coûte 250 francs. Le silicium est cassant et il se forme lors du sciage des fissures d’environ 20 micromètres de profondeur à sa surface. Sur les disques usuels de 300 micromètres d’épaisseur, ces fissures sont éliminées par décapage chimique. Au total les déchets du sciage atteignent près de 30 pour-cent.

 
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Micrographie électronique: Les chercheurs de l’Empa ont examiné avec la fine pointe de diamant d’un nanoindenteur comment les fissures se forment sur les wafers de silicium.
 

Réduire les prix en diminuant les rebuts


Si les chercheurs désirent obtenir des disques plus minces, il faut aussi qu’ils réduisent les microfissures. Une réduction de leur profondeur de moitié serait déjà «un grand pas» relève Wasmer. Avec le partenaire HCT qui fabrique des scies multifils, Wasmer et son collègue Adrien Bidiville étudient maintenant comment naissent ces fissures. Pour cela ils ont tout d’abord relevé les paramètres du sciage tels qu’entre autres la taille des particules sur les fils de sciage ou la vitesse du fil.

 

Puis à l’aide de ces données ils ont procédé à des expériences sur des modèles. Avec la pointe de diamant ultrafine d’un nanoindenteur, ils ont créé des fissures dans des disques de silicium et observé minutieusement au microscope électronique comment elles naissent et se propagent. Ce n’est qu’une fois que toutes ces étapes auront été analysées que Wasmer pourra établir un concept pour optimiser le sciage. Selon lui l’importance économique est considérable, avec une économie d’un tiers des coûts.

 

Un savoir-faire nouveau pour le partenaire industriel


L’équipe de Michler vient d’achever un autre projet CTI similaire, et cela avec un succès tel que l’Agence pour la promotion de l’innovation CTI lui a consacré un article sous la rubrique «Success Story» dans son rapport annuel. Là aussi il s’agissait de fissures mais cette fois sur des pièces microscopiques pour des lasers. Ces pièces sont découpées dans des disques d’arséniure de gallium appelés wafers. Ces pièces d’une hauteur et d’une largeur de 300 micromètres et d’une longueur de deux millimètres sont si petites que 40 d’entre elles tiennent sur un seul carreau d’un papier quadrillé. Et leur prix est si élevé, 150 dollars la pièce, que là aussi tout rebut est indésirable. Mais c’est précisément de tels rebuts qui apparaissaient chez le partenaire Bookham Switzerland, un fabricant de diodes laser, lorsque les arêtes n’étaient pas absolument lisses comme un miroir lors du fendage des tranches d’arséniure de gallium. Aux dimensions auxquelles travaille un laser, des agglomérats de quelques molécules d’arséniure de galium conduisent à des inégalités qui rendent la pièce inutilisable. Là aussi des microfissures se produisaient lors de l’incisage des wafers.

 

 

Transfert de technologie avec un profit pour les deux parties


Michler et Wasmer ont examiné avec un appareillage spécial comment les fissures de produisaient sur les wafers. Tout comme dans le projet sur les cellules photovoltaïques, ils ont procédé en trois étapes. «La solution du problème», déclare Michler, «consistait à ne plus inciser les wafers. Au lieu de cela nous utilisons une pyramide en diamant qui est enfoncée comme un coin dans le wafer qui est ensuite cassé». Le partenaire industriel fut très impressionné par cette méthode qui lui a permis d’optimiser le découpage des wafers. A titre de remerciement, le laboratoire de Michler a pu conserver les instruments mis à sa disposition par Bookham et dont la valeur atteint un demi-million de francs. Ce parc d’appareil profitera à d’autres projets de nanomécanique.

Auteur: Dr Sabine Borngräber, journaliste, Bâle

 

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