L’Empa invite des cadres dirigeants pour un échange d’idées

Des idées stimulantes lors du Forum Technology & Innovation

4 déc. 2013 | MICHAEL HAGMANN
La deuxième manifestation organisée dans le cadre de la série ETIF (Empa Technology and Innovation Forum) proposait un échange d’idées stimulant aux cadres dirigeants de l’industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux. Ce forum placé sous le thème «Durabilité et innovation» avait été organisé en commun par l’Empa, l’association industrielle SWISSMEM et le Wirtschaftsmagazin. Un de ses points forts: l’histoire du «Karl’s kühne Gassenschau».
https://www.empa.ch/documents/56164/260886/a592-2013-12-04-b0x+stopper+ETIF.jpg/048b063a-6d3a-4781-96da-8d1c4466ef5f?t=1448296355000
 
Karl’s kühne Gassenschau: une scène du spectacle « r.u.p.t.u.r.e».
 
Le deuxième ETIF – après la manifestation inaugurale au mois d’avril – se proposait à nouveau de rassembler les cadres dirigeants et les membres des conseils d’administration d’entreprises nationales et internationales pour les mettre en contact avec les scientifiques de l’Empa. Dans les exposés et les conversations qui les ont suivis lors du repas, on s’est penché sur la question de la signification pour une entreprise de la durabilité et de l’innovation et des risques qu’elles recèlent.
 
Quant les innovations capotent
Après les allocutions d’ouverture de la cheffe du marketing de l’Empa Gabriele Dobenecker et du président de Swissmem Hans Hess, Manulea Stier, éditrice du Wirtschaftsmagazin, a exposé aux hôtes invités l’importance du «storytelling» pour ancrer dans l’opinion publique la stratégie de durabilité d’une entreprise: «En leur «racontant» la durabilité nous pouvons impliquer nos interlocuteurs et les inciter à se former leur propre opinion» a expliqué Manuela Stier. Il ne s’agit pas là de ne mettre en évidence que ce qui est positif. Les histoires sont aussi faites de problèmes et de conflits. De nombreuses entreprises ne tiennent pas compte de cela dans leurs success stories, «ce qui leur fait perdre leur crédibilité et les rend ennuyeuses», comme l’a mis en garde cette entrepreneuse en communication. Son scepticisme était toutefois infondé pour ce qui est des exposés qui ont suivi. Nombre d’orateurs ont parlé très ouvertement d’innovations qui se sont terminées par un capotage.
 

 
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  Karl’s kühne Gassenschau: une scène du spectacle «Chantier»
 

 
Résistance chez les spécialistes
Balz Halter, propriétaire du groupe Halter, a exposé sa vision de la gestion de l’énergie dans les immeubles d’habitation du futur, cela au moyen d’un microprocesseur qui échange des signaux à travers le réseau électrique interne du bâtiment. Malheureusement, on est confronté précisément dans la branche de la construction à «un environnement non seulement sceptique mais même résistant vis-à-vis des innovations.» Le problème n’est pas tant les maitres d’ouvrage mais au contraire souvent les conseillers et les projeteurs qu’il faut convaincre à grand peine. Halter estime que des solutions simples mais efficientes offrent davantage de chances: «Nous ne devons pas tenter de ramasser quelques miettes en engageant de gros moyens.» Il conseille plutôt d’économiser des coûts dans la construction en renonçant parfois à épuiser toutes les possibilités techniques.
 
Comment on réinvente les toitures
Hans Ruedi Schweizer dirige l’entreprise Schweizer Metallbau AG, qui a commencé il y a 36 ans à produire des systèmes porteurs pour les panneaux solaires et est parvenue jusqu’ici à défendre sa position sur ce marché niche. «Nous avons rencontré des portes plus que largement ouvertes lorsque nous n’avons plus monté les panneaux solaires sur les tuiles mais à la place de celles-ci», ainsi que cet entrepreneur décrit l’idée novatrice de son entreprise. Il s’agit d’assurer ce succès par une stratégie durable. Le cashflow est consacré au maintien et au développement de l’entreprise ainsi que, en plus, au versement de boni aux collaborateurs. Schweizer Metallbau AG développe ses nouveaux produits selon une procédure standard: idée – avant projet – définition du projet – conception du produit– prototype – avant-série – série.
 

 
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  Le directeur de l’Empa Gian Luca Bona (2e à dr.) en conversation avec des hôtes de l’ETIF.
 

 
Recyclage de meubles au plus haut niveau – de prix aussi
Michael Girsberger, CEO de Girsberger Holding AG, a montré comment rester à flot dans le marché du meuble âprement disputé par les fabricants de «fast furniture». Son entreprise est diversifiée, fournit à la fois du bois aux menuisiers et produit une ligne de meubles au design exclusif – et entretient, comme secteur qui bénéficie de la croissance la plus rapide, un département «Service & Remanufacturing», qui se consacre à la rénovation des meubles usagés. «Nous enregistrons là un véritable boom» déclare Girsberger. «Conserver au lieu de remplacer, rénover plutôt qu’éliminer, c’est devenu là la devise de nombre de nos clients.» Un marché niche bien loin d’Ikea & Co.
 
«Un produit que personne ne désire posséder»
Lukas Braunschweiler, CEO de Sonova Holding AG a présenté son entreprise avec une déclaration pour le moins étonnante: «Nous développons des aides auditives – un produit que personne ne désire posséder!» Rester présent sur ce marché soumis à une évolution technologique extrêmement rapide exige une stratégie bien élaborée. Braunschweiler subdivise cette stratégie en cinq thèses qu’il a exposées en détail. L’une d’elles : accepter les changements. Les modèles de distribution des aides auditives évoluent de manière dramatique, en direction d’Internet. Conduire lentement Sonova dans cette direction aurait pris trop de temps; la direction de l’entreprise a donc décidé de racheter tout simplement Hearing Planet, le leader du marché Internet dans ce domaine aux USA.
 

 
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  Les orateurs de l’ETIF sur la scène ; à droite, en position légèrement acrobatique, Ernesto Graf du Karl’s kühne Gassenschau.
 

 
Les bonds technologiques sont aussi d’une nécessité absolue mais ne sont pas toujours réalisables dans le cadre de la culture propre de l’entreprise. Il existe un appareil auditif (développé en Californie!) dont la taille ne dépasse pas celle d’un grain de riz et qui, batterie comprise, disparait pour deux mois dans le conduit auditif. «Nous aurions pu le réaliser, mais nous ne l’avons pas produit» relève d’une manière autocritique Braunschweiler. Finalement Sonova a aussi racheté cette entreprise pour l’intégrer dans sa holding. Il est nécessaire de faire preuve de courage et de persévérance, a déclaré le CEO de Sonova qui a conclu sur une citation du fondateur d’IBM Thomas Watson: «If you want to increase success, double your failure rate.»
 

Jouer avec la peur comme recette du succès
Pour finir, un entrepreneur extraordinairement innovateur, dont le portefeuille de produits éclipsait tous les autres, s’est présenté: Ernesto Graf, directeur de la troupe d’acrobates Karl’s kühne Gassenschau. Cette entreprise casse-cou, au sens littéral du terme, existe depuis 1984 et a derrière elle plusieurs métamorphoses, qui ont conduit à des cascades toujours plus audacieuses et à un financement lui aussi toujours plus audacieux. «Nous avons tout simplement été tentés de vivre des pitreries de gamins que d’autres cessent de faire à 18 ans» déclare Graf qui achevé des études de mathématique avant sa carrière d’acrobate. Karl’s kühne Gassenschau «joue avec les peurs – les siennes propres et celles du public», comme l’explique ce professionnel de la scène. Et c’est précisément ce qui semble être la clé du succès de son entreprise.

 

 

La série de conférences ETIF se poursuivra l’année prochaine.

 
 


 

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